Le Vénérable Aryadeva (suite 3)

Paul Adam est, pour un certain temps, le guide d’un journaliste de Paris-Match et de son photographe pour un reportage sur le bouddhisme en particulier et sur l’Inde en général, paru dans les numéros 319, 320, 321 et 456. C’est l’occasion d’un véritable périple qui les conduira aux points stratégiques de la vie du prince Siddharta qui devait devenir le Bouddha Gautama. Ils passeront du confort de la jeep au char à bœufs, en l’occurrence des zébus attelés à une plate-forme prolongée d’un timon et posée sur deux roues de bois plein, à l’éléphant, au sommet duquel est installé un palanquin de fortune. Cahotés et secoués avec les zébus, cramponnés à ce qu’ils peuvent à dos d’éléphant qui les ballotte dans tous les sens, ils franchissent les rivières et parviennent aux buts fixés dans les temps et ont même de l’avance sur leur programme. Par la suite, le reporter et Paul Adam conserveront des liens d’amitié.

Pendant quinze ans, il parcourt l’Inde du Nord et les pays limitrophes, s’aventurant derrière la frontière du Tibet chinois jusqu’au milieu des sadhu shivaïtes revêtus de cendres et porteurs du trident. Pris au milieu de tempêtes de neige dans l’Himalaya, subissant la chaleur torride des plaines de l’Inde ou confronté aux dégâts causés par la mousson, il continue avec la même sérénité à faire face à toutes les situations.

Reconnu pour son savoir, il est le premier Occidental à être reçu par les brahmanes dans le temple d’or de Bénarès. Sollicité pour prendre la parole lors de meetings traditionnels, il est l’objet d’actes de reconnaissance inhabituels pour un européen. Que ce soit dans les jungles, dans les lieux de pèlerinage, dans les plus modestes villages qu’il traverse ou dans les plus grands monastères, Paul Adam accumule les renseignements relatifs à la clef de la connaissance.

Il est photographié une sandale à la main avec le pandit Nehru lors d’une réception officielle. On le voit défiler dans les rues lors du 2500e anniversaire du Bouddha. Afin de réserver et de centraliser le précieux héritage des textes sacrés, il participe en juillet 1960 à la fondation d’une société bouddhique dans l’Himalaya, la Buddhist himalayan society, et refuse la présidence du Kamaleshvari Sarvodaya-samstan, « la société pour le bien de tous », mouvement gandhiste indien, à tendance plus politique que traditionnelle. À l’aise aussi bien avec les serpents qu’au milieu de l’hostilité de certains brahmanes sectaires, il est le confident ou celui que l’on vient consulter sur les textes sacrés. Sa correspondance avec les uns et les autres est plus riche d’enseignements traditionnels qu’elle ne contient d’informations sur lui-même. Il est si bien intégré que, lorsqu’il annonce son départ pour retourner en France, aucun de ses amis ne croit qu’il sera capable de rester loin de l’Inde.

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